Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome I.djvu/301

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XII. Pour tirer des soupçons de l’action même, il faut en examiner la marche dans tous les points. De ces soupçons, les uns naissent du fait en particulier, les autres tout à la fois du fait et de la personne. On les tire du fait, en examinant attentivement tout ce que nous avons rapporté aux choses. Il est facile de voir que ce point embrasse tous les genres et presque toutes leurs espèces.

Examinez d’abord les circonstances inhérentes au sujet, c’est-à-dire, qui en sont inséparables ; et il suffit pour cela de considérer ce qui a précédé, ce qui a donné l’espoir de réussir, quels ont été les moyens d’exécuter, quel est le fait lui-même, quelles en sont les suites.

Occupez-vous avec une égale attention des moindres détails qui ont rapport à l’exécution ; car ce lieu commun est le second de ceux que nous attribuons aux choses. Il faut alors examiner le lieu, le temps, l’occasion, le pouvoir : quatre points, dont nous avons expliqué avec soin la nature et la force, en traitant de la confirmation. Aussi, pour qu’on ne puisse pas nous reprocher de n’en point parler ici, ou de nous répéter, nous allons montrer en peu de mots ce qui, dans chacun d’eux, doit fixer l’attention. Dans le lieu, c’est la commodité ; dans le temps, la durée ; dans l’occasion, l’opportunité ; dans le pouvoir, l’abondance et la disposition des moyens indispensables pour l’exécution, ou qui la facilitent.

Considérez ensuite les circonstances, c’est-à-dire, ce qui est plus grand, moindre, égal ou semblable. On en peut tirer des conjectures, en considérant avec attention quelle est la tournure habituelle des choses plus grandes, moindres, égales ou semblables. C’est à ce lieu qu’il faut rapporter le résultat, je veux dire ce que produit d’ordinaire chaque chose, comme la crainte, la joie, l’incertitude.

Les conséquences forment le quatrième lieu que nous avons attribué aux choses. Elles comprennent ce qui dépend du fait, immédiatement ou non. C’est ici qu’il faut considérer quelle est la coutume, quelle est la loi, la formule d’accusation, la manière de poursuivre, l’usage ou l’habitude, l’intérêt ou la haine que l’action inspire, parce que ces moyens peuvent quelquefois conduire à des conjectures et à des soupçons.

XIII. Il est d’autres soupçons qui naissent tout à la fois et des lieux attribués aux choses, et des lieux attribués aux personnes ; car tout ce qui concerne et la fortune, et la nature, et la manière de vivre, les goûts, les actions, les événements, les discours, les intentions, enfin le physique et le moral, font partie de tout ce qui contribue à rendre un fait probable ou incroyable, et se joignent aux conjectures.

On doit surtout examiner dans cet état de question, d’abord si le délit est possible ; ensuite, si tout autre que l’accusé peut en être l’auteur ; puis on discute la facilité qu’il a eue de le commettre, point dont nous avons parlé plus haut ; si cette action était de nature à causer des remords, et en même temps quel espoir on avait de la cacher ;