Page:Clément - La Revanche des communeux.djvu/39

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour éviter les regards des quelques passants et des sergents de ville qu’elle rencontre : la pauvre volée a peur qu’on la prenne pour une voleuse !

Toujours trottant, elle va droit devant elle. Elle passe devant une église. Des vieilles femmes ratatinées comme de vieilles bibles en gravissent les marches. Elle s’arrête, puis, reprenant sa course : « A quoi bon ?… soupire-t-elle, je l’ai déjà tant prié ! »

Arrivée aux grands boulevards, elle passe, apeurée, au milieu d’une bande de viveurs ivres et débraillés, poussés, le pied au derrière, par des fillasses dépeignées qui gueulent en chœur le refrain de Notre-Dame de la Galette.

Elle passe par les Halles. Le va-et-vient des porteurs, les jurons des paysans, l’encombrement des voitures l’ahurissent, elle presse le pas : « Il y a de tout là, pourtant, dit-elle, ça sent les légumes, la viande, le poisson, les fruits ! comment se fait-il donc qu’il y en ait tant qui meurent de faim ? »

Elle arrive sur les quais, s’arrête au milieu d’un pont, se penche en dehors du parapet, regarde et se sauve en disant : « J’ai peur, c’est trop haut ! »

Elle reprend les quais, cherchant un chemin qui descende à la Seine. De temps en temps, elle recouvre le petit qui ne bouge pas plus que s’il était mort. Du reste il n’en vaut guère mieux.

Elle trouve le chemin et gagne vite le bord de l’eau : « Comme ça, murmure-t-elle, c’est moins haut ! »

Rapidement, elle débarrasse du châle le visage de