Page:Claudel - Connaissance de l’est larousse 1920.djvu/16

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Elle se compose de trois cours et de trois temples, flanqués de chapelles accessoires et de dépendances. Le lieu religieux ici n’enferme pas, comme en Europe, unique et clos, le mystère d’une foi et d’un dogme circonscrits. Sa fonction n’est pas de défendre contre les apparences extérieures l’absolu ; il établit un certain milieu, et, suspendu en quelque sorte au ciel, l’édifice mêle toute la nature à l’offrande qu’il constitue. Multiple, de plain pied avec le sol, il exprime, par les relations d’élévation et de distance des trois arcs de triomphe ou temples qu’il lui consacre, l’espace ; et Bouddha, prince de la Paix, y habite avec tous les dieux. L’architecture chinoise supprime, pour ainsi dire, les murs ; elle amplifie et multiplie les toits, et, en exagérant les cornes qui se relèvent d’un élégant élan, elle en retourne vers le ciel le mouvement et la courbure ; ils demeurent comme suspendus, et, plus la fabrique du toit sera ample et chargée, plus, par sa lourdeur même, s’en accroîtra la légèreté, de toute l’ombre que projette au-dessous de lui son envergure. De là l’emploi des tuiles noires formant des rainures profondes et de fortes côtes, qui, en haut laissant entre elles des jours, détachent et dégagent le faîte : amenuisé, fleuri, il découpe dans l’air lucide sa frise. Le temple est donc un portique, un dais, une tente dont les coins relevés sont