Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/238

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de tous mes soupirs, de tous mes rêves et de tout mon amour. Je le parcours des yeux avec délices… mais bientôt je l’accueillis avec ravissement.

« Rien ne me paraissait préférable à la jouissance que j’allais goûter, de sorte que, craignant que la douleur n’empêchât le plaisir, je joignis mes secousses à celles de mon athlète. À peine poussai-je quelques tendres plaintes.

« Extasiée, je me livrai à ses transports corps et âme, puis je restai quelque temps accablée par la fatigue et le plaisir.

« C’est ainsi que je vis s’accomplir mes plus violents désirs et que je perdis cette babiole dont la garde est semée de tant d’épines ; un accident heureux et inopiné me procura cette occasion, car ce jeune gentleman arrivait à l’instant du collège et venait familièrement dans la chambre de sa mère, dont il connaissait la situation pour y avoir été souvent autrefois, quoique je ne l’eusse jamais vu et que nous ne nous connussions que d’ouï-dire.

« Les précautions du jeune athlète, cette fois et plusieurs autres que j’eus le plaisir de le voir, m’épargnèrent le désagrément d’être surprise dans mes fréquents exercices. Mais la force d’un tempérament que je ne pouvais réprimer, et qui me rendait les plaisirs de la jouissance préférables à ceux d’exister, m’ayant souvent trahie par des indiscrétions fatales à ma fortune, je tombai à la fin dans la nécessité d’être le partage du public, ce qui, sans doute, eût causé ma perte, si la fortune ne m’eût fait rencontré ce tranquille et agréable refuge. »

À peine Louisa avait-elle cessé de parler qu’on nous avertit que la compagnie était réunie et nous attendait.

Là-dessus, Mme Cole, me prenant par la main, avec un sourire d’encouragement, me conduisit en haut précédée de Louisa qui nous éclairait avec deux bougies, une dans chaque main.