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du Midi que le commerce n’enrichit et n’anime pas.

Qu’on s’imagine une jeune fille de quinze ans, belle, élégante, ayant, par ses lectures, plus que par sentiment, des aspirations vaguement poétiques ; les habitudes de la vie parisienne ; une grand’mère princesse qui avait dû sa fortune à sa beauté, avait possédé un palais à Paris et en habitait un à Bruxelles ; cette jeune fille, sachant la destinée éblouissante de cette aïeule qui finissait désormais dans les honneurs une vie d’aventures sans nombre ; cette jeune fille s’entendant dire qu’elle ressemblait à cette grand’mère dont elle avait les yeux noirs et profonds et l’ardeur de son sang espagnol ; qu’on se figure cette pauvre et belle enfant, condamnée à vivre dans cette morne petite ville dont je viens de parler. Son père sans fortune y occupe un emploi. Il faut recevoir les bourgeoises de la ville et écouter leurs sottises.

Pour se distraire elle écrit à ses amies de Paris ; elle me confie le marasme qui la gagne, elle rêve et pleure sur les bords de l’Adour, et s’essaie à faire des vers sur les histoires d’amour que la tradition a perpétuées dans le pays ; elle chante Couramé qu’un jour le fleuve au nom sonore a entraîné dans son cours. Comme l’amant désespéré de la légende, elle