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aventures ébruitées parmi le beau sexe plébéien, et s’était mis un peu à la merci de sa femme.

Ostensiblement Aglaé professait l’intolérance des passions ; elle avait toutes les raideurs du langage et suivait une règle religieuse étroite et ponctuelle qui parangonait sa vertu ; chaque matin elle allait à la messe ; chaque soir aux prières récitées ou chantées dans la petite chapelle des Eaux-Bonnes ; parfois même elle jouait de l’orgue tandis que les voix incultes et sonores des montagnards béarnais entonnaient les psaumes qui s’élevaient majestueusement agrandis par les échos des montagnes. Elle tenta vainement d’entraîner le bel Italien au mysticisme ; elle avait beau lui dire qu’elle priait pour lui ; il se révoltait contre ce mélange de coquetterie provocante et de dévotion d’apparat.

Nous savions ces détails, Nérine et moi, par l’écolier qui trouvait un plaisir malin à surveiller la marquise et le bel Italien.

Ce pauvre Adolphe de Chaly, malgré les admonestations de ses nobles parents, s’obstinait à nous suivre ou plutôt à nous rencontrer dans nos promenades. Chaque jour il apportait des fleurs à Nérine et chaque jour lui aussi faisait des toilettes inouïes pour atténuer sa laideur. Il m’empruntait les livres nouveaux que je recevais de Paris ; essayait de cau-