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ser art et voyages avec Nérine, et tous les soirs, avant de regagner sa chambre, nous faisait demander un moment d’entretien. Nérine refusait presque toujours, car dans l’incurable tristesse qui était sa seconde nature, ce garçon mal venu et forcément burlesque l’ennuyait ; mais parfois, dans l’espérance d’égayer mon amie et de me divertir moi-même, j’insistais pour que le jeune Adolphe fût introduit. Alors il nous narrait, en enfant indiscret et envieux de ces tendres mystères, ce qui s’était passé dans la journée ; les évolutions redoublées d’Aglaé autour du mourant et la résistance tantôt passive et tantôt fébrile de celui-ci.

— Elle en triomphera ! lui disais-je en riant.

— Non, non, il est trop malade, répondait naïvement ou peut-être malicieusement Adolphe ; il ne songe qu’à recouvrer assez de force pour se mettre en voyage et revoir son pays.

— Je n’aime pas que vous vous fassiez ainsi l’espion de votre jeune cousine, lui disait sérieusement Nérine ; son intérêt pour cet étranger qui se meurt est tout simple et ne peut impliquer le but que vous supposez à cette jeune femme ; son mari est jeune, beau, ils doivent faire en définitive excellent ménage, malgré quelques coquetteries apparentes qu’il ne nous appartient pas de juger.