Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/374

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sées. L’une consistait à vous faire signer le parchemin ; l’autre à gagner du temps, en souscrivant des billets à trois mois. Cette dernière ressource est évidemment celle à laquelle on a recours aujourd’hui, et nous pouvons nous abandonner à l’espérance que, d’ici à quelque temps, nous n’aurons plus le contre-coup des embarras de sir Percival.

— Oh ! Marian, vos pronostics sont trop favorables pour être vrais !

— En vérité, mon aimée ?… Tout à l’heure encore, vous me complimentiez sur ma bonne mémoire et vous semblez maintenant vous en méfier. Je vais aller chercher mon « Journal » et vous verrez si j’ai tort ou raison…

Je sortis et rapportai immédiatement le volume.

En nous référant au paragraphe relatif à la visite de l’avocat, nous constatâmes que je m’étais fort exactement rappelé les deux alternatives soumises au choix de son client. L’assurance que ma mémoire m’avait servie, en cette occasion tout aussi fidèlement que de coutume, soulagea mon esprit presqu’autant que celui de Laura. Dans l’incertitude périlleuse de notre situation actuelle, il serait difficile de dire quels intérêts d’avenir peuvent dépendre de la régularité avec laquelle mon « Journal » est tenu, et du plus ou moins de confiance que je puis avoir dans la fidélité de mes souvenirs au moment où je les y transcris jour par jour.

La physionomie et l’attitude de Laura m’indiquèrent que cette dernière considération l’avait frappée aussi bien que moi-même. En somme, pourtant, ce n’est qu’un détail peu essentiel, et j’ai presque honte de le mentionner ici, tant il jette une triste lumière sur l’isolement et l’abandon où nous sommes. Il faut vraiment avoir à compter sur bien peu de chose, pour que cette découverte de la confiance que je puis placer dans ma mémoire soit presque saluée comme le serait celle d’un nouveau protecteur !

Le premier coup du dîner nous sépara. Il venait à peine de sonner, quand sir Percival et le comte rentrèrent de leur promenade. Nous entendîmes le maître du château