Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/375

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faire pleuvoir sur les domestiques une grêle de reproches parce qu’ils étaient en retard de cinq minutes ; et son hôte s’interposait, comme d’ordinaire, pour prêcher le sang-froid, la patience et la paix.

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La soirée est maintenant terminée. Il n’est rien survenu d’extraordinaire. Mais, dans la conduite de sir Percival et du comte, j’ai remarqué certaines particularités qui m’ont fait rentrer chez moi, fort inquiète sur le compte d’Anne Catherick et sur les résultats que peut amener la journée de demain.

J’en sais assez, à l’heure qu’il est, pour être certaine que, des aspects divers sous lesquels se montre sir Percival, le plus trompeur, et par conséquent le moins favorable, est celui où il déploie le plus de courtoisie. Or, il est revenu de cette longue promenade avec son ami beaucoup plus poli qu’il ne l’était depuis longtemps, plus particulièrement vis-à-vis de sa femme. Elle se montra surprise, et moi je fus secrètement alarmée quand il l’appela par son petit nom, lui demandant si elle avait eu, dans ces derniers temps, des nouvelles de son oncle, s’informant de l’époque où mistress Vesey serait invitée par elle à venir à Blackwater-Park ; bref, multipliant les petites prévenances, les attentions délicates, de manière à nous rappeler l’époque haïssable où, à Limmeridge-House, il sollicitait la main de Laura. C’était pour commencer, un mauvais signe ; et je trouvai d’un présage plus mauvais encore qu’il fît semblant, après le dîner, de s’assoupir dans un coin du salon, et que son regard sournois nous suivît pourtant, moi et ma sœur, quand il put croire que ni l’une ni l’autre, nous ne soupçonnions sa ruse. Je n’ai jamais douté que cette soudaine excursion qu’il a faite, à lui tout seul, n’eût eu pour but d’aller à Welmingham questionner mistress Catherick ; — mais ce qui s’est passé ce soir m’a donné à craindre que l’expédition n’ait pas été entreprise en vain, et qu’il se soit procuré les renseignements dont, à coup sûr, il était