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Page:Compain - La vie tragique de Geneviève, 1912.pdf/299

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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

doute, quatre peut-être… et l’autre est un bébé encore. On voit qu’elle a pâti avant de mourir ! Elles ont lutté, les pauvrettes, contre l’asphyxie ; leurs yeux sont clos, mais la plus grande, avec sa bouche ouverte, garde un air d’épouvante. Quelle horrible histoire les a conduites ici ?

Les yeux de la jeune fille font le tour de la salle macabre et s’arrêtent sur les petits cadavres. Dans le silence, ils semblent se raconter des histoires effroyables. « Moi, dit l’un je suis mort d’urémie à six ans, mon père était alcoolique ; moi, la broncho-pneumonie m’a fauché en trois jours ; moi, je suis né couvert du mal qui m’a enlevé ; moi je n’ai jamais mangé à ma faim ; moi, j étais battu ; moi, mon père et ma mère m’avaient abandonné. » Demain, ils s’en iront tous couchés dans leurs boîtes légères, demain la salle sera pleine encore, car la moisson des petits enfants est grande !

Mais celles-ci qui furent élevées par une tendre mère, quelles misères accumulées les ont conduites en ce lieu ? Était-ce là que Marguerite devait les connaître, elle qui les aurait : aimées et sauvées ! Oh ! l’atroce ironie de la vie !