Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/65

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qui se produisent en nous, sans être plus avertis des unes que des autres ; la conscience en est si légère que, si l’on nous retire de cet état, nous ne nous souvenons pas d’en avoir éprouvé. Je suppose qu’on me présente un tableau fort composé, dont, à la première vue, les parties ne me frappent pas plus vivement les unes que les autres ; & qu’on me l’enlève avant que j’aie eu le temps de le considérer en détail : il est certain qu’il n’y a aucune de ses parties sensibles qui n’ait produit en moi des perceptions ; mais la conscience en a été si foible, que je ne puis m’en souvenir. Cet oubli ne vient pas de leur peu de durée. Quand on supposeroit que j’ai eu, pendant longtemps, les yeux attachés sur ce tableau ; pourvu qu’on ajoute que je n’ai pas rendu, tour à tour, plus vive la conscience des perceptions de chaque partie ; je ne serai pas plus en état, au bout de plusieurs heures, d’en rendre compte, qu’au premier instant.