Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/66

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce qui se trouve vrai des perceptions qu’occasionne ce tableau doit l’être, par la même raison, de celles que produisent les objets qui m’environnent. Si, agissant sur les sens avec des forces presque égales, ils produisent en moi des perceptions toutes, à peu près, dans un pareil dégré de vivacité ; &, si mon ame se laisse aller à leur impression, sans chercher à avoir plus conscience d’une perception que d’une autre, il ne me restera aucun souvenir de ce qui s’est passé en moi. Il me semblera que mon ame a été, pendant tout ce temps, dans une espèce d’assoupissement, où elle n’étoit occupée d’aucune pensée. Que cet état dure plusieurs heures, ou seulement quelques secondes ; je n’en sçaurois remarquer la différence dans la suite des perceptions que j’ai éprouvées, puisqu’elles sont également oubliées dans l’un & l’autre cas. Si même on le faisoit durer des jours, des mois, ou des années ; il arriveroit que, quand on en sortiroit par quelque sensation vive, on ne se rappelleroit