Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/314

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talent de l’invention dans les petites choses. Tous ceux en qui on peut observer cette réunion sont les ennemis naturels des sociétés savantes, devant qui ni leurs prétentions, ni leurs erreurs, n’ont pu trouver grâce. L’opiniâtreté attachée à ces défauts de l’esprit ne leur permet pas de comprendre qu’on puisse de bonne foi refuser d’adopter leurs opinions, d’admirer leurs prétendues inventions, de reconnaître la supériorité de leurs talents ; ils ne voient que l’envie qui puisse expliquer un phénomène si extraordinaire. On me dispensera de prouver cette observation par des exemples. Tout homme qui connaît les détails de ce qui se passe journellement dans les sciences en trouvera sans peine ; mais j’observerai que, parmi les nombreux détracteurs des académies, pris dans le nombre de ceux qui se donnent pour savants, il n’en est pas un seul dont il ne soit facile d’expliquer par ce moyen la mauvaise humeur et la haine de ce qu’ils appellent si ridiculement l’aristocratie littéraire ; il n’en est pas un seul pour qui on ne puisse dire quelle est l’ignorance grossière, le système chimérique, la vaine prétention qui, repoussée par un jugement sévère, mais à peine juste, ou même par le silence, a été la cause secrète de sa colère.

Joignez-y une foule d’hommes qui, occupés des arts dont les sciences sont la base, voient dans les sociétés savantes des juges redoutables pour la charlatanerie, et dans leurs membres, des censeurs qui peuvent les apprécier et découvrir leur ignorance, quel que soit le masque dont ils essayent de la couvrir. Ils traînent à leur suite une foule non moins