Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/444

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Conclusion.


Telles sont sur l’instruction publique, les idées dont j’ai cru devoir l’hommage à mon pays ; elles sont le produit d’une longue suite de réflexions, d’observations constantes sur la marche de l’esprit humain dans les sciences et dans la philosophie. Longtemps j’ai considéré ces vues comme des rêves qui ne devaient se réaliser que dans un avenir indéterminé, et pour un monde où je n’existerais plus. Un heureux événement a tout à coup ouvert une carrière immense aux espérances du genre humain ; un seul instant a mis un siècle de distance entre l’homme du jour et celui du lendemain. Des esclaves, dressés pour le service ou le plaisir d’un maître, se sont réveillés étonnés de n’en plus avoir, de sentir que leurs forces, leur industrie, leurs idées, leur volonté n’appartenaient plus qu’à eux-mêmes. Dans un temps de ténèbres, ce réveil n’eût duré qu’un moment : fatigués de leur indépendance, ils auraient cherché dans de nouveaux fers un sommeil douloureux et pénible ; dans un siècle de lumières, ce réveil sera éternel. Le seul souverain des peuples libres, la vérité, dont les hommes de génie sont les ministres, étendra sur l’univers entier sa douce et irrésistible puissance ; par elle tous les hommes apprendront ce qu’ils doivent vouloir pour leur bonheur, et ils ne voudront plus que le bien commun de tous. Aussi, cette révolution n’est-elle pas celle d’un gouvernement, c’est celle des opinions et des