Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 7.djvu/454

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

s’y livrer tout entiers ; combien, en facilitant aux autres la publication prompte de leurs travaux, ces corporations ont servi aux progrès des lumières.

À peine, depuis cent trente ans qu’elles existent, citerait-on une seule découverte qui n’ait pas été faite par un homme attaché à ces mêmes corporations, ou adoptée par elles ; et cependant jamais, dans aucune époque de l’histoire, les sciences n’ont été cultivées, et plus généralement, et avec plus de succès.

Ces corporations n’ont point formé les hommes de génie dont le nom honore leur liste ; mais elles leur ont donné le moyen de développer leurs talents, de se faire connaître, d’acquérir cette première réputation qui leur a permis depuis de se livrer à de plus grands travaux.

Avant l’invention de l’imprimerie, l’instruction était très chère ; et chez les peuples anciens, ce fut une des causes qui contribuèrent le plus à conserver l’esprit aristocratique de leurs gouvernements. Heureusement chez les nations modernes, ce même esprit dominateur du clergé, qui a fait tant de maux, ne pouvant s’exercer qu’en multipliant les instruments, a été forcé de multiplier aussi les écoles, et de les ouvrir par des fondations nombreuses à la classe pauvre du peuple, et, dès lors, malgré toutes les précautions prises pour détruire la raison sous un fatras de fausse science, on vit des hommes supérieurs à leur siècle, soutenir les droits de la vérité, et, en réclamant pour l’Église l’égalité démocratique, préparer les esprits à en reconnaître l’éternelle justice dans toute son étendue.