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et soumis comme les autres êtres aux lois générales de son mécanisme, ils étoient en quelque sorte un hors-d’œuvre de ce systême.

Des hommes durs, orgueilleux, injustes, se cachèrent sous le masque du stoïcisme. Des hommes voluptueux et corrompus se glissèrent souvent dans les jardins d’Épicure. On calomnia les principes des épicuriens, qu’on accusa de placer le souverain bien dans les voluptés grossières. On tourna en ridicule les prétentions du sage de Zénon, qui, esclave tournant la meule, ou tourmenté de la goutte, n’en est pas moins heureux, libre, et souverain.

Cette philosophie qui prétendoit s’élever au-dessus de la nature, et celle qui ne vouloit qu’y obéir ; cette morale qui ne reconnoissoit d’autre bien que la vertu, et celle qui plaçoit le bonheur dans la volupté, conduisoient aux mêmes conséquences pratiques, en partant de principes si contraires, en tenant un langage si opposé. Cette ressemblance dans les préceptes moraux de toutes les religions, de toutes les sectes de