Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/234

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rivèrent, et John et Grace furent unis dans une des principales églises de Bath.

Chatterton avait aussi assisté au mariage ; et la même gazette, qui donnait les détails de la noce, annonçait l’arrivée aux eaux du duc de Derwent et de sa sœur, du marquis d’Eltringham et de ses sœurs, au nombre desquelles était lady Laura Denbigh. La douairière, qui lisait ce paragraphe, ajouta qu’elle avait entendu dire que le mari de cette dernière était resté près d’un vieux parent très-malade, dont-il attendait une grande fortune. Émilie avait changé plusieurs fois de couleur en entendant parler de Denbigh, mais elle fit tous ses efforts pour écarter de son imagination des souvenirs trop dangereux, et bientôt elle reprit au moins l’apparence de la sérénité.

Jane et Émilie se trouvaient placées toutes deux dans une position bien délicate ; elles avaient besoin d’appeler à leur secours toute leur force de caractère, car elles étaient exposées à rencontrer tous les jours et à toute heure, l’une son ancien amant, l’autre la femme de celui qu’elle avait tant aimé, et que, malgré tous ses efforts, elle aimait encore.

Jane était soutenue par sa fierté, et Émilie par ses principes. L’aînée, dans les lieux de réunion, se tenait toujours à l’écart, pour éviter tout contact avec ceux qu’elle haïssait maintenant, et elle se montrait toujours froide et contrainte. Sa sœur, douce, humble et réservée, n’en était que plus séduisante. Le dépit et le désappointement de l’une étaient soupçonnés de tous ceux qui l’approchaient, tandis que la douleur profonde de l’autre n’était connue que de ses plus chers amis.

La première rencontre que craignaient les deux sœurs eut lieu dans le salon où se réunissaient chaque soir les étrangers que la saison des eaux amenait à Bath, et où les deux mères désirèrent présenter la jeune mariée.

En entrant dans le salon, les premières personnes qu’elles aperçurent furent les Jarvis. Lady Jarvis s’empressa de venir saluer les dames, toute fière de pouvoir faire étalage devant elles de son titre et de son gendre ; son mari approcha aussi d’un air respectueux de ses anciens voisins. La première fut reçue avec une politesse froide, et son mari avec une franche cordialité. Egerton, sa femme et miss Jarvis saluèrent de loin ; le colonel se retira aussitôt après dans un autre coin de l’appartement, et son ab-