Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/224

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La fin de cette affaire offrit un champ étendu aux commentaires que pouvait faire un bon observateur des hommes. Dès que la vérité fut généralement connue sur la question de savoir à qui appartenait la pointe de terre contestée, et que le public fut bien assuré que, bien loin d’avoir le moindre droit à la propriété, il n’en avait joui que par faveur, ceux qui s’étaient compromis par des assertions ridicules et par des outrages indécents voulurent sauver leur amour-propre en cherchant des excuses pour leur conduite dans celle de l’autre partie. Ils blâmèrent hautement M. Effingham de n’avoir pas fait ce qu’il avait précisément fait, c’est-à-dire informé ses concitoyens que le public n’avait aucun droit à cette propriété ; et quand on leur démontra que ce reproche était une absurdité, ils se plaignirent du mode qu’il avait adopté pour faire ce qu’il avait fait, quoique ce fût celui que chacun, en pareil cas, employait constamment. Après ces accusations vagues et indéfinies, ceux qui avaient fait le plus de bruit dans cette affaire commencèrent à nier tout ce qu’ils avaient dit, en déclarant qu’ils avaient toujours su que cette propriété appartenait à M. Effingham, mais qu’ils n’aimaient pas que lui, ou qui que ce fût, eût la présomption de vouloir leur apprendre ce qu’ils savaient déjà. En un mot, la fin de cette affaire montra la nature humaine sous ses aspects ordinaires de prévarication, de mensonge, de contradiction et d’inconséquence ; et malgré les appels à la liberté qu’ils avaient faits, ceux qui avaient été le plus coupables d’injustice furent ceux qui se plaignirent le plus haut comme si c’étaient eux seuls qui eussent souffert.

— Je dois convenir, John, dit M. Effingham qu’après une si longue absence ce pays ne se montre pas à nous sous le jour le plus favorable ; mais on trouve des erreurs dans tous les pays et dans toutes les institutions.

— Oui, Édouard, voyez les choses du plus beau côté, c’est votre usage mais si vous n’adoptez pas ma manière de penser avant que vous soyez d’un an plus vieux, je renonce à l’honneur d’être prophète. — Je voudrais que nous pussions connaître le fond de la pensée de miss Effingham à ce sujet.

— Miss Effingham, dit Ève, a été affligée, désappointée, contrariée, mais elle ne désespère pas de la république. D’abord aucun de nos voisins respectables n’a pris part à cette affaire, et c’est quelque chose ; quoique j’avoue que je suis surprise qu’une portion considérable de la communauté, qui se respecte, souffre