Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/199

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et se décidera comme il le fit alors en faveur des Américains. Il a certaines partialités naturelles à ceux qui sont nés en Angleterre, mais sur ce point son esprit est fortement américain.

— C’est ce maudit établissement sur ce rocher qui est cause de cela. Que n’est-il resté dans la société parmi ses égaux, nous le verrions aujourd’hui à notre tête ? — Maud, je sais que je puis me confier à vous.

Maud était charmée de cette confiance, et elle leva sur le major ses grands yeux bleus dont l’expression montrait bien quelque chose de la douce satisfaction qu’elle éprouvait ; mais elle ne répondit rien.

— Vous devez bien penser que je n’ai pas fait ce voyage tout à fait sans motif, je veux dire sans un motif plus important même que de vous voir tous. Le commandant en chef est chargé de lever plusieurs régiments dans ce pays, et l’on pense à mettre à leur tête des hommes influents dans les colonies. Le vieux Noll de Lancey, par exemple, si bien connu de nous tous, va diriger une brigade, et j’ai sur moi une lettre de lui dans laquelle il offre un de ses régiments à sir Hugh Willoughby. Un des Allens de Pensylvanie, qui était contre nous, a renoncé à la commission du congrès depuis cette criminelle déclaration, et a consenti à commander un bataillon du roi. Pensez-vous que tout cela n’aura pas de poids auprès de mon père ?

— Il est probable que cela lui fera faire des réflexions, mais il ne changera pas d’idée. M. Allen de Lancey peut se décider à être général, mais mon père s’est retiré, et il ne songe plus à prendre du service. Il nous a dit qu’il ne s’était jamais plu à la guerre, et qu’il s’est trouvé plus heureux de venir ici que lorsqu’il a gagné sa première commission. M. Allen a peut-être bien fait de changer d’opinion, dit-il, mais moi je ne vois pas la nécessité d’en changer. Je suis ici avec ma femme et mes filles, et le soin de leur sûreté m’occupe assez dans ces temps de troubles. Que pensez-vous qu’il ait dit, Bob, dans une de ses conversations avec nous sur ce sujet ?

— Je ne sais, quoique j’appréhende qu’il n’ait parlé de la pitoyable politique du jour.

— Bien loin de là, ce sont de bons sentiments qui appartiennent ou qui doivent appartenir à tous les jours et à tous les âges, répondit Maud d’une voix émue. Mon fils est là, nous a-t-il