Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/46

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tellement familiarisée avec cet état de choses, et tellement habituée à voir les barrières dans l’endroit qu’elles occupaient, qu’elle ne les regardait plus que comme de simples ornements, comme ces lions en pierre qui se trouvent fréquemment des deux côtés d’une porte.

L’intérieur de la hutte avait cependant subi beaucoup de changements. La partie occidentale avait été complétée, et d’élégantes chambres disposées pour les hôtes et les amis. Les hangars, les écuries et les logements des ouvriers ayant été transportés sur la lisière de la forêt, la maison était devenue la demeure exclusive de la famille. Par derrière, une aile avait été construite sur le bord de la colline, fermant ainsi complètement la cour. Cette aile, qui dominait la petite rivière, et d’où les regards plongeaient sur un paysage des plus pittoresques, contenait maintenant la bibliothèque, le parloir et le salon de musique, ainsi que les autres pièces consacrées aux dames pendant le jour, les appartements qui servaient d’abord à ces différentes destinations ayant été convertis en chambres à coucher. Cette aile nouvelle était entièrement construite en énormes pièces de bois, à l’épreuve de la balle, sans qu’on jugeât nécessaire de faire une fondation en pierre, à cause de sa position sur les bords d’un escarpement qui avait bien quarante pieds de hauteur. De ce côté de l’édifice, il y avait des fenêtres extérieures, l’élévation du bâtiment le mettant hors de portée des projectiles ennemis, tandis que la vue se reposait agréablement sur de fraîches campagnes. Aussi le capitaine avait-il soigneusement disposé toutes les prairies qui s’étendaient sous ses fenêtres, leur conservant leurs limites naturelles, de manière que les yeux pussent embrasser toute la forêt vierge, en reléguant au sud, à une distance assez considérable pour n’être pas vues, les granges, les cabanes et les autres constructions secondaires. Beulah Willoughby, douce et paisible créature, avait une admiration profonde pour les beautés de la nature, et c’est à elle qu’avait été confiée la surveillance de tout ce qui était considéré comme un travail artificiel pour charmer les yeux : son bon goût avait aidé et complété les riches efforts de la nature. Dans les fissures des rochers avait été rapportée de la terre végétale, d’où s’élançaient les tiges capricieuses de rosiers sauvages, et les bords de la petite rivière qui baignait la base de la colline étaient ornés de sautes et d’aunes. Sur le devant de la maison s’étendait une