Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/14

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Une assez belle maison de deux étages, bâtie en bois, suivant la coutume du comté de Suffolk, au fond d’une pelouse, et d’un riche verger où l’on remarquait quatre longues rangées de cerisiers magnifiques, était la demeure du diacre Pratt. Tout dans la maison et dans la ferme offrait l’image de l’ordre le plus parfait. La vue en était agréable ; car le devant de la maison se trouvait exposé à l’est, tandis qu’aux deux extrémités une des fenêtres regardait le Sund, et l’autre le bras de mer qui appartient, nous le croyons, à Peconic Bay.

Toute cette eau qu’on apercevait derrière différents points de la rive, et entre les îles, à côté d’une étendue de terrain étroite, mais fertile et riante, devait former un assez beau paysage.

Mais le diacre pratt n’était point artiste, et il songeait peu aux spectacles de la nature, au moment où son cheval s’arrêta devant la maison. Marie était sous le porche, et paraissait attendre son oncle avec anxiété. Il donna les guides à un nègre qui n’était plus esclave, mais qui, descendant des anciens esclaves des Pratts, consentait, en cette qualité, à rôder autour de la fermer où il travaillait à moitié prix.

— Eh bien, dit Pratt en s’approchant de sa nièce, comment va-t-il maintenant ?

— Oh ! mon oncle, je crois impossible qu’il en revienne, et je vous supplie d’envoyer chercher au port le docteur Sage.

Marie voulait dire par le port, celui, de Sag-Harbour, où le médecin qu’elle venait de nommer jouissait d’une réputation méritée.

Quelques semaines auparavant, un vaisseau qui se rendait sans doute à New-York avait déposé sur la plage d’Oyster-Pond un matelot déjà vieux et atteint d’une maladie qui semblait mortelle.

Il était natif d’une île qui porte le nom de Martha’s Vineyard (le vignoble de Marthe) ; mais, suivant l’habitude des jeunes garçons de cette île, il l’avait quittée à l’âgé de douze ans, et il y avait un peu plus de cinquante ans qu’il était absent de la terre natale. Ce matelot, qui s’appelait Thomas Bagget, se sentant atteint d’une maladie incurable, revenait mourir où il était né,