Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/198

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schooner fut attachée à la proue du cutter par les efforts simultanés des deux équipages. En cet instant, et au milieu du tumulte, on entendit la voix du capitaine anglais qui criait à ses gens de le suivre à l’abordage.

— En avant ! en avant à l’arrière du tribord ! cria Barnstable avec son porte-voix.

Ce fut le dernier ordre qu’il donna avec cet instrument ; et en parlant ainsi, il le jeta loin de lui, et courut le sabre à la main vers l’endroit que l’ennemi menaçait. Les cris des combattants, les injures qu’ils s’adressaient réciproquement succédèrent alors au bruit du canon dont il n’était plus possible de se servir, quoique les décharges de fusils et de pistolets continuassent sans interruption.

— Jetez-le à bas de son pont, cria, en montrant Barnstable, le capitaine anglais qui, entouré d’une douzaine de ses plus braves marins, était alors sur la proue, prêt à sauter sur l’Ariel ; jetez à la mer tous ces rebelles !

— À moi, camarades ! à moi ! s’écria Barnstable en renversant celui de ses ennemis qui était le plus avancé ; que pas un deux ne boive ce soir un verre de grog !

La décharge de mousqueterie qui partit de l’Ariel exécuta cet ordre presque à la lettre, et le commandant de l’Alerte, se voyant presque seul sur sa proue, recula sur le pont pour ranimer ses gens et les ramener au combat.

— À l’abordage ! s’écria Barnstable ; suivez-moi tous ! que pas un ne reste. À l’abordage !

Et joignant l’exemple au précepte, il allait sauter le premier sur le cutter, quand une main qui semblait de fer le saisit par le bras, et le força à reculer.

C’était Tom Coffin. — C’est la baleine qui va expirer, mon capitaine, lui dit-il, ce n’est pas à vous à vous exposer à ses coups de queue ; laissez-moi passer avec mon harpon.

Sans attendre de réponse, le contre-maître se mit en avant, redressa sa taille gigantesque, fit un saut pour s’élancer sur l’Alerte, mais soudain une vague sépara un moment les deux navires, et Coffin tomba à la mer. Comme une décharge de mousquets était partie en même temps du cutter, l’équipage de l’Ariel crut que le contre-maître avait été tué, et la fureur qu’il en conçut redoubla en entendant son commandant s’écrier :