Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/301

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doute pas que l’enfant ne parle avec candeur. Je voudrais que mon parent, M. Christophe Dillon, fût ici, pour qu’il me dît si je commettrais un acte de trahison en souffrant que ce jeune homme se retirât librement et sans échange.

— Demandez-lui des nouvelles du cacique, dit Borroughcliffe qui, satisfait d’avoir pénétré le mystère du travestissement du jeune officier américain, avait repris sa place à table ; peut-être monsieur est-il dans le fait un ambassadeur chargé de faire des propositions en faveur de Son Altesse prisonnière.

— Eh bien ! Monsieur, demanda le colonel, pouvez-vous me dire ce qu’est devenu mon cousin Christophe Dillon ?

Tous les yeux étaient fixés sur Merry, et l’on vit avec surprise le changement soudain de tous ses traits, qui perdirent leur air de gaieté insouciante pour exprimer une horreur profonde. Enfin il ouvrit la bouche pour faire connaître, d’une voix sourde et creuse, le secret du destin de Dillon.

— Il est mort.

— Mort ! répétèrent tous ceux qui étaient dans l’appartement.

— Oui, mort, dit Merry en regardant tour à tour les visages pâles de ceux qui l’écoutaient.

Un silence de consternation qui dura quelques minutes suivit l’annonce de cette nouvelle. Griffith fut le premier à le rompre.

— Expliquez-nous de quelle manière il est mort, Monsieur, dit-il à Merry, et dites-nous ce qu’est devenu son corps.

Le jeune midshipman ne répondit qu’à la seconde question, car il sentit que s’il en disait trop il ferait connaître le naufrage de l’Ariel et compromettrait la sûreté de Barnstable et de ses compagnons.

— Il est enterré dans les sables, sur le bord de la mer, dit-il.

— Dans les sables ! répétèrent encore tous ceux qui l’entouraient.

— Mais vous ne dites pas comment il est mort, reprit Griffith.

— C’est ce que je ne puis expliquer, répondit Merry.

— Il a été assassiné ! s’écria le colonel Howard qui recouvra enfin l’usage de la parole, dont la surprise, le chagrin, la colère et la consternation l’avaient privé ; lâchement assassiné par les traîtres.

— Il n’a point été assassiné, dit le jeune Américain avec fermeté, et il est mort au milieu de gens qui ne méritent ni le nom de lâches, ni celui de traîtres.