Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/329

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de la Grande-Bretagne. De par mon palais ! cette idée fait rayonner de joie les yeux de vos drôles ! ils savent par instinct qu’une tranche de roast-beef et un pot de porter sont une meilleure compagnie pour des marins qui ont fait naufrage que des baïonnettes et des piques d’abordage.

— Ne plaisantez pas hors de saison, s’écria Griffith avec impatience ; vous avez la supériorité du nombre, j’en conviens ; mais vous assurerait-elle la victoire dans une lutte mortelle d’homme à homme ? c’est une question que je laisse à votre prudence le soin de décider. Nous ne sommes pas ici pour accepter des conditions, mais pour en accorder. Que proposez-vous donc, Monsieur ? Soyez bref, car les circonstances n’admettent point de délai.

— Je vous ai offert la jouissance des trois choses les plus nécessaires de la vie : manger, boire, dormir. Que demandez-vous de plus ?

— Que vous ordonniez à ces soldats qui occupent la porte de la galerie de se retirer, et de nous laisser passer en paix, ce que je désire principalement pour éviter la vue du sang à des yeux qui n’y sont pas accoutumés ; avant de refuser cette demande, songez que vos forces sont divisées, et qu’il serait bien facile à ces braves gens de s’ouvrir un passage la pique en avant.

— Votre compagnon le capitaine Manuel a assez d’expérience pour vous dire qu’une pareille manœuvre serait contre toutes les règles de l’art militaire, ayant sur vos derrières une force supérieure.

— Je n’ai pas le loisir d’écouter de pareilles folies, s’écria Griffith avec indignation ; m’accordez-vous la sortie libre de l’abbaye, oui ou non ?

— Non.

Griffith se tourna vers les trois dames avec l’air de la plus vive agitation, et leur fit signe de se retirer, car il se sentait incapable de leur adresser la parole. Cependant, après un instant de silence, il fit encore une tentative de conciliation.

— Si Manuel et moi nous consentons à retourner en prison, dit-il, et que nous nous soumettions à tout ce qu’il plaira au gouvernement anglais d’ordonner de notre sort, nos autres compagnons pourront-ils se rendre librement et paisiblement à notre frégate ?

— Impossible, répondit Borroughcliffe, qui, voyant que l’in-