Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/228

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Pour vous, j’aurai toujours une place à ma forge.
Mais sachez que le prix qu’ils demandent m’égorge,
Que je ferme demain l’atelier, et que ceux
Qui font les turbulents sont tous des paresseux.
C’est là mon dernier mot, vous pouvez le leur dire. »
 
Moi je réponds :
                            « C’est bien, monsieur. »
                                                                    Je me retire,
Le cœur sombre, et m’en vais rapporter aux amis
Cette réponse, ainsi que je l’avais promis.
Là-dessus, grand tumulte. On parle politique.
On jure de ne pas rentrer à la boutique ;
Et, dam ! je jure aussi, moi, comme les anciens.
Oh ! plus d’un, ce soir-là, lorsque devant les siens
Il jeta sur un coin de table sa monnaie,
Ne dut pas, j’en réponds, se sentir l’âme gaie,
Ni sommeiller sa nuit tout entière, en songeant
Que de longtemps peut-être on n’aurait plus d’argent,
Et qu’il allait falloir s’accoutumer au jeûne.
— Pour moi, le coup fut dur, car je ne suis plus jeune
Et je ne suis pas seul. ― Lorsque, rentré chez nous,
Je pris mes deux petits-enfants sur mes genoux,