Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/99

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Ou bien suivait de l’œil l’arête des piliers.
Il était seul. Parfois une flamme hardie
Sur les vitraux étroits reflétait l’incendie,
Et les cris des vassaux en liesse au dehors
Par instants arrivaient moins lointains et plus forts.

Rigide sous le froc et pareil aux fantômes,
Le moine s’était mis à réciter des psaumes
Souvent interrompus d’un lent miserere,
Quand soudain il pâlit, et son œil égaré
S’emplit d’une épouvante effroyable et niaise ;
Ses maigres doigts crispés aux deux bras de sa chaise,
Il restait là, dompté, pétrifié, béant :
Le margrave s’était dressé sur son séant,
Voilé, blanc, et faisant de grands gestes étranges
Pour se débarrasser de ses funèbres langes.
Et celui qu’on croyait la pâture des vers
Apparut tout à coup vivant, les yeux ouverts,
Reconnut d’un regard vague et surpris à peine
Le moine, les flambeaux, le crucifix d’ébène,
Le bénitier plein d’eau bénite avec son buis,
Et dit d’une voix claire :
                                            « Où suis-je ? Je ne puis
Dire si je rêvais ou si j’étais mort. Moine,