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histoire.

tion, dont on n’avait jamais vu d’exemple. Ils avaient ainsi l’occasion de connaître la France en la personne du plus illustre de ses exilés. La mort du prédicateur de La Haye priva les églises du désert d’un tel député auprès de l’Europe.

Cette perte ferma l’école de la grande littérature théologique des réfugiés français. Lors de leur bannissement du sein de la France, lors de la ruine simultanée de leurs académies et de leurs temples, la science religieuse était en voie notable de progrès. Les savantes idées de Samuel Bochart, de Caen, avaient ouvert la lice où les recherches de l’érudition orientale et classique allaient constituer la théologie à l’état de science archéologique. Les monuments des arts et les traditions mythologiques de tout l’ancien monde furent rapprochés des annales hébraïques ; ce fut le premier pas de l’école féconde où marchèrent, un siècle et demi plus tard, Heyne et Bauer. Dès les premières années du xviiie siècle, un autre savant réfugié, homme d’une imagination excitable, mais laborieux, plein de zèle et d’une érudition consciencieuse, Pierre Jurieu, de Mer, dans l’Orléanais, pasteur à Rotterdam, avait examiné, dans une histoire générale des dogmes, quelle fut la filière des idées religieuses des peuples de l’antiquité, et comment l’humanité se développa sous le point de vue religieux (1704). Jurieu termina sa carrière un peu avant la mort de Louis XIV, lorsque les églises désolées auraient eu le plus besoin du secours de sa science ; mais ses pressentiments politiques l’avaient déconsidéré dans ses derniers jours (1713). Ce vaste et méthodique travail avait paru presque en même temps que celui de Jacques Basnage, de Rouen, qui passa de longues années de son exil à écrire sa grande his-