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son loyer ; le décret du 20 février 1793 l’oblige, à partir de 20 ans, à payer un quart en sus de la contribution foncière et la loi du 3 nivôse an VII surhausse ses loyers d’habitation de moitié de leur valeur imposable.

Comme citoyen même, il est l’objet d’incapacités politiques. Un texte lui interdit l’entrée d’une assemblée législative. Cette originale déchéance est inscrite dans la constitution directoriale du 5 fructidor an III dont l’article 83 commence ainsi : « Nul ne peut être élu membre du Conseil des Anciens s’il n’est âgé de 40 ans accomplis ; si de plus il n’est marié ou veuf… » Le même motif d’exclusion fut, lors des travaux préparatoires, adopté pour les Cinq-Cents. La discussion révéla chez les Conventionnels un esprit de famille, une fraîcheur de caractère presque attendrissants et je regretterais de ne pas vous offrir quelques échantillons de leur éloquence. Rien ne peut mieux d’ailleurs nous renseigner sur les préoccupations et l’état d’âme d’un bon citoyen de cette époque.

Lorsqu’on discuta les conditions d’éligibilité au Conseil des Anciens[1], nul n’osa élever la voix en faveur des infortunés célibataires. Cambacérès demanda seulement qu’on ne prive pas « du droit de servir la patrie, l’homme vertueux qui adopte un enfant ». La courte et grave réponse de Villetard : « Un homme n’est jamais meilleur citoyen que quand il est bon père, bon époux, » méritait quelques développements. Larevellière-Lépeaux se chargea d’orchestrer ce thème. Il analysa l’amour de la patrie, y fit entrer « ce penchant irrésistible qui nous entraîne vers celle dont nous voulons partager pour la vie les peines et les plaisirs, ce

  1. Art. 46 du projet (Constitution, art. 83). Moniteur, Réimp., t. XXV, pp. 287 sq.