Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/505

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Et contre mes fureurs je trouve en mes deux fils
Deux enfants révoltés et deux rivaux unis.
Quoi ? sans émotion perdre trône et maîtresse !
1480Quel est ici ton charme, odieuse princesse ?
Et par quel privilège, allumant de tels feux,
Peux-tu n’en prendre qu’un et m’ôter tous les deux ?
N’espère pas pourtant triompher de ma haine :
Pour régner sur deux cœurs, tu n’es pas encor reine.
1485Je sais bien qu’en l’état où tous deux je les voi,
Il me les faut percer pour aller jusqu’à toi ;
Mais n’importe : mes mains, sur le père enhardies,
Pour un bras refusé sauront prendre deux vies ;
Leurs jours également sont pour moi dangereux ;
1490J’ai commencé par lui, j’achèverai par eux.
Sors de mon cœur, Nature, ou fais qu’ils m’obéissent :
Fais-les servir ma haine, ou consens qu’ils périssent.
Mais déjà l’un a vu que je les veux punir :
Souvent qui tarde trop se laisse prévenir.
1495Allons chercher le temps d’immoler mes victimes[1],
Et de me rendre heureuse à force de grands crimes.

FIN DU QUATRIÈME ACTE.
  1. Var. Allons chercher le temps d’immoler nos victimes
    Et de nous rendre heureuse à force de grands crimes. (1647-56)