Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/234

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Léontine

Oui, c’est bien lui montrer ta haine et ta colère,
Que lui vendre ton prince et le sang de ton père.

Exupère

L’apparence vous trompe, et je suis en effet…

Léontine

L’homme le plus méchant que la nature ait fait.

Exupère

Ce qui passe à vos yeux pour une perfidie…

Léontine

Cache une intention fort noble et fort hardie !

Exupère

Pouvez-vous en juger, puisque vous l’ignorez ?
Considérez l’état de tous nos conjurés :
Il n’est aucun de nous à qui sa violence
N’ait donné trop de lieu d’une juste vengeance,
Et nous en croyant tous dans notre âme indignés,
Le tyran du palais nous a éloignés.
Il y fallait rentrer par quelque grand service.

Léontine

Et tu crois m’éblouir avec cet artifice ?

Exupère

Madame, apprenez tout. Je n’ai rien hasardé.
Vous savez de quel nombre il est toujours gardé ;
Pouvions-nous le surprendre, ou forcer les cohortes
Qui de jour et de nuit tiennent toutes ses portes ?
Pouvions-nous mieux sans bruit nous approcher de lui ?
Vous voyez la posture où j’y suis aujourd’hui :
Il me parle, il m’écoute, il me croit, et lui-même