Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/235

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Se livre entre mes mains, aide à mon stratagème.
C’est par mes seuls conseils qu’il veut publiquement
Du prince Héraclius faire le châtiment,
Que sa milice, éparse à chaque coin des rues,
A laissé du palais les portes presque nues ;
Je puis en un moment m’y rendre le plus fort ;
Mes amis sont tout prêts ; c’en est fait, il est mort,
Et j’userai si bien de l’accès qu’il me donne
Qu’aux pieds d’Héraclius je mettrai sa couronne.
Mais après mes desseins pleinement découverts,
De grâce, faites-moi connaître qui je sers,
Et ne le cachez plus à ce cœur qui n’aspire
Qu’à le rendre aujourd’hui maître de tout l’empire.

Léontine

Esprit lâche et grossier, quelle brutalité
Te fait juger en moi tant de crédulité ?
Va, d’un piège si lourd l’appât est inutile,
Traître, et si tu n’as point de ruse plus subtile…

Exupère

Je vous dis vrai, Madame, et vous dirai de plus…

Léontine

Ne me fais point ici de contes superflus ;
L’effet à tes discours ôte toute croyance.

Exupère

Eh bien ! Demeurez donc dans votre défiance :
Je ne demande plus, et ne vous dis plus rien ;
Gardez votre secret, je garderai le mien ;
Puisque je passe encor pour homme à vous séduire,
Venez dans la prison où je vais vous conduire.
Si vous ne me croyez, craignez ce que je puis.
Avant la fin du jour vous saurez qui je suis.