Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/435

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Mais son sang, que le ciel n’a formé que de boue,
Et dont il cache exprès la source obstinément…

DONA ELVIRE

Vous pourriez en juger plus favorablement ;
Sa naissance inconnue est peut-être sans tache :
Vous la présumez basse à cause qu’il la cache ;
Mais combien a-t-on vu de princes déguisés
Signaler leur vertu sous des noms supposés,
Dompter des nations, gagner des diadèmes,
Sans qu’aucun les connût, sans se connaître eux-mêmes !

DONA LÉONOR

Quoi ?
Voilà donc enfin de quoi vous vous flattez !

DONA ELVIRE

J’aime et prise en Carlos ses rares qualités.
Il n’est point d’âme noble à qui tant de vaillance
N’arrache cette estime et cette bienveillance ;
Et l’innocent tribut de ces affections
Que doit toute la terre aux belles actions,
N’a rien qui déshonore une jeune princesse.
En cette qualité, je l’aime et le caresse ;
En cette qualité, ses devoirs assidus
Me rendent les respects à ma naissance dus.
Il fait sa cour chez moi comme un autre peut faire :
Il a trop de vertus pour être téméraire ;
Et si jamais ses vœux s’échappaient jusqu’à moi,
Je sais ce que je suis, et ce que je me dois.

DONA LÉONOR

Daigne le juste ciel vous donner le courage
De vous en souvenir et le mettre en usage !

DONA ELVIRE

Vos ordres sur mon cœur sauront toujours régner.