Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/458

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N’ai-je point à rougir de cette déférence
Que d’un combat illustre achète la licence ?
Tu murmures, ce semble ? Achève ; explique-toi.
La reine a-t-elle droit de te faire la loi ?
Tu n’es point son sujet, l’Aragon m’a vu naître.
Ô ciel ! Je m’en souviens, et j’ose encore paraître !
Et je puis, sous les noms de comte et de marquis,
D’un malheureux pêcheur reconnaître le fils !
Honteuse obscurité, qui seule me fais craindre !
Injurieux destin, qui seul me rends à plaindre !
Plus on m’en fait sortir, plus je crains d’y rentrer,
Et crois ne t’avoir fui que pour te rencontrer.
Ton cruel souvenir sans fin me persécute ;
Du rang où l’on m’élève il me montre la chute.
Lasse-toi désormais de me faire trembler ;
Je parle à mon honneur, ne viens point le troubler.
Laisse-le sans remords m’approcher des couronnes,
Et ne viens point m’ôter plus que tu ne me donnes.
Je n’ai plus rien à toi : la guerre a consumé
Tout cet indigne sang dont tu m’avais formé ;
J’ai quitté jusqu’au nom que je tiens de ta haine,
Et ne puis… Mais voici ma véritable reine.



Scène 4



DONA ELVIRE

Ah ! Carlos, car j’ai peine à vous nommer marquis,
Non qu’un titre si beau ne vous soit bien acquis,
Non qu’avec justice il ne vous appartienne,