Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/570

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

L’avantage du trône où je suis destiné;
Et voulant seul ici défendre ce que j’aime,
Je vous avais prié de l’attaquer de même,
Et de ne mêler point surtout dans vos desseins
Ni le secours du roi ni celui des Romains :
Mais, ou vous n’avez pas la mémoire fort bonne,
Ou vous n’y mettez rien de ce qu’on vous ordonne.

Attale. Seigneur, vous me forcez à m’en souvenir mal,
Quand vous n’achevez pas de rendre tout égal.
Vous vous défaites bien de quelques droits d’aînesse ;
Mais vous défaites-vous du cœur de la princesse,
De toutes les vertus qui vous en font aimer,
Des hautes qualités qui savent tout charmer,
De trois sceptres conquis, du gain de six batailles,
Des glorieux assauts de plus de cent murailles ?
Avec de tels seconds rien n’est pour vous douteux.
Rendez donc la princesse égale entre nous deux :
Ne lui laissez plus voir ce long amas de gloire
Qu’à pleines mains sur vous a versé la victoire ;
Et faites qu’elle puisse oublier une fois
Et vos rares vertus et vos fameux exploits ;
Ou contre son amour, contre votre vaillance,
Souffrez Rome et le roi dedans l’autre balance :
Le peu qu’ils ont gagné vous fait assez juger
Qu’ils n’y mettront jamais qu’un contre-poids léger.

Nicomède. C’est n’avoir pas perdu tout votre temps à Rome,
Que vous savoir ainsi défendre en galant homme.
Vous avez de l’esprit, si vous n’avez du cœur.


Scène VII

.
Arsinoé, Nicomède, Attale, Araspe
.


Araspe.