Page:Corneille - Dictionnaire des arts, 1694, T1, E-L.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LAM LAM 599

il leche sa bave & le bord de cette coque. C’est apparemment du Latin Lambere, Lecher, qu’il a esté appellé Lambis. Sa chair est si dure qu’on n’en peut manger à quelque sauce qu’on la puisse mettre. Les Sauvages qui la font cuire avec de l’eau de marine pour l’amollir, ne laissent pas d’en manger assez souvent. Sa coque estant calcinée & mêlée avec du sable de riviere, on en compose un ciment qui resiste à la pluye & à toutes les injures du temps. Ce Lambis s’entonne aussi comme un cor de chasse, & s’entend de loin, ce qui est cause que les Habitans s’en servent pour appeller leurs gens aux repas.

LAMBOURDE. s. f. Terme de Charpentier. Piece de bois de sciage qui a trois pouces en quarré, que l’on met sur les planchers pour y attacher des ais ou du parquet. On appelle aussi Lambourdes, des Pieces de bois qui sont aux costez des poutres, & où il y a des entailles pour poser des solives.

Il y a une pierre qu’on appelle Pierre de lambourde. Cette pierre est tendre comme le saint Leu, & se trouve prés d’Arcuëil. Elle porte depuis vingt pouces jusqu’à cinq pieds, mais on la delite.

LAMBREQUIN. s. m. Terme de Blason. Les Lambrequins sont volets d’étoffe decoupez qui descendent du casque. Ils coëffent & embrassent l’écu pour luy servir d’ornement. Quelques-uns disent Lamequin, d’autres Lambequin, & il y en a qui croyent que le mot de Lambrequins est venu de ce qu’ils pendoient en lambeaux, & estoient tout hachez des coups qu’ils avoient receus dans les batailles. Ceux qui sont formez de feüillages entremeslez les uns dans les autres, sont tenus plus nobles que ceux qui sont composez de plumes naturelles. Le fond & le gros du corps des Lambrequins doivent estre de l’émail du fond & du champ de l’écu ; mais c’est de ses autres émaux qu’on en doit faire les bords. Les Lambrequins estoient l’ancienne couverture des casques, comme la cotte d’armes estoit celle du reste de l’armure. Cette sorte de couverture preservoit les casques de la pluye & de la poudre, & c’estoit par là que les Chevaliers estoient reconnus dans la meslée. On les faisoit d’étoffe, & ils servoient à soustenir & à lier les cimiers qu’on faisoit de plumes. Comme ils ressembloient en quelque façon à des feüilles d’Acanthe, quelques-uns les ont appellez Feüillards. On les a mis quelquefois sur le casque en forme de bonnet élevé comme celuy du Doge de Venise, & leur origine vient des anciens chaperons qui servoient de coëffure aux hommes aussi-bien qu’aux femmes.

LAMBRIS. s. m. Mot general, qui signifie toutes sortes de Platfonds, & les Ouvrages de menuiserie dont on revest les murailles. Ainsi quand on dit qu’une chambre est toute lambrissée, on veut dire, Qu’elle est toute revestuë de bois par le haut & par les costez. M. Felibien observe, que lors qu’on attache des Lambris contre les poutres ou solives, il faut laisser de petits trous afin que le vent y passe & qu’il empesche que le bois ne s’échauffe estant l’un contre l’autre, ce qui se fait pour prevenir les accidents qui peuvent arriver par les Lambris attachez aux planchers contre les solives ou poutres, que la pesanteur du bois fait affaisser & arrener, & mesme se gaster & se corrompre sans que l’on s’en apperçoive. On appelle aussi Lambris, Un enduit de plastre au sas sur des lattes jointives, cloüées sur les bois des cloisons & des platfonds. Quelques-uns font venir ce mot du Latin Ambrices, Lattes. D’autres le derivent d’Imbrex, Tuile. L’assemblage par panneaux, montans ou pilastres de menuiserie, dont on couvre les murs d’une chambre ou d’une salle, en


tout ou en partie seulement, est appellé Lambris de menuiserie. Celuy qui n’a que deux à trois pieds de hauteur dans le pourtour d’une piece & dans les embrasures des croisées, s’appelle Lambris d’appuy, & on dit Lambris de revestement, pour dire, Celuy qui est depuis le bas jusqu’en haut. Quand il ne passe pas la hauteur de l’attique d’une cheminée en sorte qu’on met de la tapisserie au dessus, il est appellé Lambris de demi-revestement.

On appelle Lambris de marbre, Un revestement pas compartimens de diverses sortes de marbre, qui est ou arasé, ou avec des saillies ; & Lambris feint, Celuy qui est peint par compartimens de couleur de bois ou de marbre.

LAMBRUSQUE. s. f. Espece de vigne sauvage qui est toûjours verte. Il y en a de deux sortes, l’une qui ne rend jamais son fruit meur, & qui jette une fleur que l’on appelle Oenanthé ; l’autre qui rend son fruit meur. Ce fruit est fait de petits raisins noirs & astringents. Dioscoride qui en parle ainsi, ajouste que ses feüilles, tendons & sarmens ont la mesme proprieté que ceux de la vigne cultivée.

LAME. s. f. Petite plaque de metal, deliée à peu prés comme un jetton, ou une autre petite piece de monnoye. On appelle aussi Lame, la matiere d’or ou d’argent qui se jette dans des chassis qu’on dispose pour cela avec du sable preparé & bien battu. On fait venir le mot de Lame du Grec έλαμένη, participe de έλάω, qui veut dire en Latin, Ductile opus facio.

On appelle en Architecture Lame de plomb, Un morceau de plomb mince & battu qu’on met entre les tambours d’une colomne, sous les bases ou les chapiteaux de pierre ou de marbre posez à sec sans mortier, afin d’empescher qu’ils ne s’éclatent.

Lame. Terme de Rubanier. Espece de petites lattes, qui en soustenant les marches se baissent & se haussent comme elles, à mesure qu’on remuë les pieds.

Lame, signifie aussi la partie du métier de Tisserant qui sert à hausser & à baisser l’étain pour faire courir la navette à travers.

Lame. Terme de Marine. Vagues de la mer qu’elle pousse les unes contre les autres quand elle est bien agitée. On dit que La lame vient de l’avant, de l’arriere, que La lame prend par le travers, pour dire, que Le vent pousse la mer de l’un de ces costez.

LAMÉ, ée. adj. Terme de Manufacture. Drap broché & lamé d’or & d’argent.

LAMIE. s. f. Monstre marin qui est d’une si prodigieuse grandeur, qu’on a trouvé des hommes entiers dans son estomac. C’est le plus goulu de tous les poissons. Il luy faut peu de temps pour digerer. Il a les dents aspres, grosses & aiguës, decoupées comme une scie, & de figure triangulaire. Elles sont disposées par six rangs, dont le premier paroist hors la gueule. Celles du second sont droites, & les autres courbées en dedans. Ce poisson est une masse si pesante, qu’une charrette tirée par deux chevaux ne peut le traîner qu’à peine. Les Lamies sont nommées Chiens de mer par quelques uns.

On a donné ce mesme nom de Lamies à une certaine espece de demons ou de Sorcieres qu’on a pretendu qui devoroient les enfans. On le fait venir d’un mot Hebreu qui est interpreté pour un Demon femme qui devore les enfans, & de là on a appellé Lamie le Monstre marin qui porte ce nom, à cause qu’il devore les petits des autres poissons. Il y en a qui veulent qu’une Lamie soit un animal ayant un visage de femme & toute la partie inferieure d’un cheval.