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mens endurcis. On l’estime pareillement propre à guerir la galle qui dépend d’un acide, mais il faut bien prendre garde à n’y mesler rien d’acide, à cause qu’elle imprimeroit sur la peau des taches blanches, qui seroient long-temps à s’en aller.

Les Lessives fortes, comme celle de chaux vive & celle de sel de tartre, sont des menstruës salins, urineux, qui dissoudent tous les souphres, & tirent mesme ceux des metaux. La raison qu’Ettmuller en donne dans sa Chymie nouvelle raisonnée, est que les Lessives conviennent radicalement avec les corps sulphureux, à cause que les sels fixes dont les Lessives se font, se forment dans la calcination des corps du sel volatile, & de l’acide ou souphre qui se changent en un troisiéme sel salé, & c’est à raison de ce principe sulphureux, qu’elles agissent sur les corps d’une nature sulphureuse. Ainsi la Lessive de chaux vive, dissout l’antimoine en souphre antimonial, & la Lessive de sel de tartre dissout le souphre crud.

LEST. s. m. Terme de Marine. Ce qui sert à faire entrer un Vaisseau dans l’eau, & à le tenir en assiette contre les coups de vent qui pourroient le renverser. Quand on dit Lest sans rien ajouster, on entend seulement des pierres, du sable, ou quelque autre chose que l’on met à fond de cale. On appelle Bon lest, De petits cailloux que l’on arrange aisément, Gros lest, Des quartiers de canons crevez & de grosses pierres ; Mauvais lest, Tout ce qui peut fondre à fond de cale, comme du sel, ou ce qui peut entrer dans les pompes & les engorger, comme du sable, du gravier ; Lest lavé, Du lest qu’on lave aprés qu’il a déja servy, pour s’en servir de nouveau. Ordinairement on met du Lest neuf une fois en deux années. Il n’en faut pas également pour tous les Vaisseaux. Quelques-uns n’en prennent que la moitié de leur charge, d’autres le tiers, & d’autres le quart ; cela dépend de la maniere dont ils sont construits. Il en faut davantage aux bastimens que l’on fait plats de varangue, & ceux qui sont courts de varangue, & arrondis par la carene en demandent moins, à cause qu’ils enfoncent plus avant dans l’eau qui les soustient mieux, parce qu’elle porte autour de cette rondeur. On fait le Lest des Vaisseaux de guerre, avec de petits cailloux sans terre ny sable, afin que le fond de cale soit plus propre. Lest vient de l’Allemand Last, qui signifie Charge. On l’appelle aussi Balast & Quintellage. Balast veut dire Premiere charge.

Lest. Poids de quatre mille livres ou de deux tonneaux dans les Vaisseaux Flamans & Anglois. On appelle Grand lest, en Suede & en Moscovie, Un poids de douze tonneaux ; & Petit lest, Celuy qui n’est que de six.

LESTAGE. s. m. Embarquement du lest dans le Navire.

LESTER. v. a. Mettre du caillou, du sable & autres choses pesantes au fond d’un Vaisseau, pour le faire tenir droit, lors qu’il est sous les voiles.

LET

LET. s. m. Vieux mot. Mauvaise action.

Comment si m’a mon oncle fet
Si grande honte & si grand let.

LETH. s. m. Terme de Marine dont on se sert pour signifier une certaine quantité de harengs. L’Ordonnance regle combien il faut employer de sel pour la salaison de chaque leth de harengs. Le leth est de dix mille milliers. Chaque millier est de dix centaines, & chaque centaine est de six vingt. On dit aussi Last & Lest de harengs.

LETHARGIE. s. f. Terme de Medecine. Assoupissement profond avec une fievre lente, où les malades dorment, & si on les éveille, ils retombent aussi-tost dans cet assoupissement, en sorte qu’ils sont sans memoire & comme stupides. La cause de la Lethargie est le trop grand engourdissement des esprits animaux, qui fait qu’ils deviennent incapables des mouvemens & des expulsions requises pour exercer les fonctions du sentiment & du mouvement. La trop grande aquosité des esprits est la cause éloignée de cet engourdissement, c’est-à-dire, lors qu’ils sont meslez de trop de phlegmes, trop peu subtils & trop peu volatiles, comme il arrive à l’esprit de vin mal dephlegmé. La Lethargie est une maladie aiguë qui tuë en sept jours, si la matiere morbifique ne s’évacuë naturellement & par crise, ou artificiellement par les selles, ou que les parotides ne paroissent le jour de crise, ou que la mesme matiere ne sorte par le nez abondamment en mouchant. Quand les symptomes augmentent & que la sueur froide sort, sur tout à la teste, le signe est mortel, aussi bien que le tremblement qui survient à la Lethargie. Lorsque la fievre & les autres symptomes diminuent, il y a beaucoup à esperer. Ce mot est Grec & formé de λήθη, Oubly, & de αργία, Engourdissement, paresse.

LETTERIL. s. m. Vieux mot. Pupitre.

LETTRE. s. f. Une des figures, un des caracteres de l’Alphabet. Acad. Fr. On croit que Moïse a trouvé les Lettres Hebraïques, que les Lettres d’Attique ont esté inventées par les Pheniciens, les Latines par Nicostrate, les Syriaques & les Chaldéennes par Abraham, les Egyptiennes par Isis, & les Gothiques par Gulfila, Evesque des Goths.

Les Imprimeurs appellent Lettres, les Caracteres de metal qui representent les lettres de l’Alphabet, & dont ils se servent pour imprimer quelque ouvrage. Ils les distinguent en Capitales, Majuscules & Initiales pour servir aux titres & aux noms propres, & en Lettres communes de toutes sortes de grosseurs, dont le gros canon est le plus gros caractere, & la Nompareille est le plus petit. Ils appellent Lettres grises ou historiées, Celles qui sont gravées sur du bois avec quelque ornement qu’ils employent au commencement des Livres ou des Chapitres, & qui tiennent la place des Lettres enluminées qu’on trouve dans les anciens Manuscrits.

Lettre, se dit aussi d’une Epistre, d’une Missive, d’une Depesche. Il y a des Lettres d’Estat, & des Lettres de cachet. Les premieres sont celles que le Roy accorde aux Ambassadeurs, aux Officiers d’armées, & à tous ceux que le service de l’État empesche de pouvoir donner ordre à leurs affaires. Elles portent surseance de toutes poursuites contre eux pendant six mois, & se renouvellent tant que le pretexte qui les fait donner subsiste. Les Lettres de cachet ne sont autre chose qu’un ordre du Roy, contenu dans une simple Lettre fermée de son cachet, & qui est souscrite par un Secretaire d’État. On appelle Lettres patentes, toutes sortes de Lettres ouvertes & étenduës de toute la longueur du papier ou du parchemin, qui contiennent les dons & les privileges que le Roy accorde. Elles doivent estre verifiées, & commencent par ces mots, A tous ceux qui ces presentes Lettres verront, &c. On appelle Lettres Royaux, Toutes les Expeditions de la grande ou petite Chancellerie, comme les Lettres de grace, qui sont obtenuës par des criminels qui avouënt avoir tué, mais à leur corps deffendant ; les Lettres de remission, pardon, abolition, par lesquelles le Roy, de sa pleine autorité remet le crime au criminel qui l’avouë ; les Lettres de rescision ou de restitution, qu’on obtient en la petite Chancelle-