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188 NICOMÊDE

mon siècle est un hommage que je rends à celui de Corneille. Je prie ceux pour qui ce poêle ne vieillit point de ne pas me soupçonner d'avoir travaillé pour eux. Je ne Tais point aux sa- vants' l'insulte de leur offrir des traductions. Mais plus on s'éloigne du temps où Corneille écrivait, plus le nombre de ses lecteurs diminue ; et je m'adresse à ces personnes qui le- gardent comme une fatigue de recueillir les choses sublimes dans une langue qui n'est plus la leur. » Il n'a donc prétendu que « rajeunir » Corneille, et, modestement, il regrette que Voltaire n'y ait pas songé avant lui; mais c'est des critiques de Voltaire qu'il s'inspire ; c'est « l'entrelacement de comédie et de tragédie » dans ?\icoinède qui révolte la délicatesse de Tronchin. Veut-on juger, sur une seule, les variantes imagi- nées par ce Genevois? Voici comment est travesti le cri fa- meux de Prusias :

Aléuagcz-moi, mon fils, avec la République.

— Gardez-vous d'offenser ici la République,

écrit un émule de Tronchin, un certain Delisle, doublé d'un certain Audibert*. Les intentions de Delisle ne sont pas moins pures : il a travaillé, dit-il, « sans autre prétention que de rendre à notre scène tragique des pièces que quelques tournures qui ont vieilli, quelques expressions impropres, en avaient éloignées. » C'est pourquoi il réduit, par exemple, Horace à deux actes. Nicoinède éprouve le sort cruel de Poli/eiicte, de Rodogune, de Pompée, de Sertorius.

11 nous a semblé plus que superflu de tenir compte, à un degré quelconque, d'une entreprise aussi misérable, dans les notes de cette édition. En revanche, du travail développé d'Andrieux sur Nicomcde - nous avons extrait quelques ob- servations ou corrections, instructives par leur fausseté même ou leur faiblesse. Ainsi peut se saisir sur le vif la différence des temps et des esprits. Ici, nous avons affaire à un com- mentateur ingénieux, plus volontiers bienveillant que Vol- taire ; au fond pourtant les préventions sont les mêmes, bien que le travail antérieur de Lekain soit très sévèrement jugé •>

1. Delisle et Aiulibert. Six tragédies de P. CorneiUe retouchées pour te théâtre, l'aris. an X (1S02), in-S».

2. Changements pour I\'icc7}iède; CEuYTes. Ayol-in-S". 1818-23. t. V. — M. Picot mentionne un manuscrit d'un nommé Brunot : Corneille au dix-neuvième siècle, ou Œuvres de Corneille remises à la scène; Bibl. nat., manusc. franc., 13078; et deuï éditions êpiin'es de Corneille, publiées à Paris, chez Lehuby, en 1845 et 1850 dans la Bibliothèque littéraire de la jeunesse.

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