Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/227

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE 1, SCENE II 215

A l'éclal de son nom faire une telle injure, 160

Et vous dégraderait peut-être dès demain

Du titre glorieux de citoyen romain.

Vous l'a-t-elle donné pour mériter sa haine

En le déshonorant par l'amour d'une reine?

Et ne savez-vous plus qu'il n'est princes ni rois 165

Qu'elle daigne égaler à ses moindres bourgeois?

Pour avoir tant vécu chez ces cœurs magnanimes,

Vous en avez bientôt oublié les maximes.

Reprenez un orgueil digne d'elle et de vous;

Remplissez mieux un nom sous qui nous tremblons tous, 170

cités par M. Marty-Laveaux, nous apprennent que ce mot de créature avait été récemment introduit dans la langue et venait dti pays des « Uomipètes », c'est-à- dire de l'Italie : « Maintenant, c'est nn mot que tous les courtisans ont à la bou- che. » Corneille s'en sert familièrement.

Je ne veux que le nom de votre créature. {Sertorhis, H, 2.) Je puis quan<l il me plait faire des créatures. (Olhon, II, 1.) 161. Vous dégraderait du titre de ritoj/en, expression figurée d'une énergie singulière, que Massillon a peut-être afTaiblie en l'employant trop souvent. 11 n'est plus de ma race après son attentat : Ce crime l'en dcgrode. {.Andromède, 1702.)

(( Je ne voudrais point d'autre raison pour déf/rader les comètes de la qualité do signes de la colère de Dieu. » (Bayle, Lettres sur les comètes.) — M. Desjardins, dans son livre sur le grand Corneille historien, signale dans ce vers un mé- lange curieux d'estime pour Rome et de mépris pour les complaisants serviles de sa politique. C'est là, il l'observe, une nuance très délicate, mais non insaisissa- ble, car on verra que Nicomède reste fidèle à la maxime de son maître Annibal : Estimer beaucoup Rome et ne la craindre point.

106. Le bourgeois, c'était proprement l'homme du bourg, do la ville fortifiée, par opposition au villain, qui était l'homme de la villa, du lieu ouvert et non fortifié, de la campagne. Voyez les exemples cités par M. Littré. Ce mot de bour- geois équivalait donc au mot de citoyen et n'était point exclusivement du style comique. — • Ce que dit ici Nicomède avec une ironie qui n'est pas du dédain, Emilie, dans Cinna (III, 4), l'avait déjà dit avec un sincère orgueil :

Pour être plus qu'un roi, t". te crois quelque chose !

Aux deux bouts de la tene en esL-il un si vain

Qu'il prétende égaler un citoyen romain?

Antoine sur sa tête attira notre haine

En se déshonorant par l'amour d'une reine.

Ce dernier vers, on le voit, est textuellement reproduit au v. 104. Balzac avait mis à la mode la peinture de ce citoyen romain, quelque peu idéalisé, qui « met le respect dans le cœur des rois et voit les couronnes des souverains au-dessous de lui ". (Le Romain.)

167. Pour avoir tant vécu ne veut pas dire ici parce que vous avez tant vécu, mais, tout au contraire, pour un homme qui a vécu. Cette construction détour avec l'infinitif, dans le sens de bien que, est commode et vive :

Un roi n'est pas moins roi pour se laisser charmer. (Pertharite, 56J.) 170. Remplissez mieux un nom, c'est-à-dire : par vos paroles et par vos actes montrez-vous plus digne de porter un nom..., soyez à la hauteur des devoirs qu'il vous impose :

Pour remplir ce grand nom as-tu besoin d'un maître? [Pertharite, 912.) Un grand prince vous laisse un grand nom à remplir. {Poésies diverses.)

�� �