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SEPTEMBRE 1767.

les conjurés, qui se doutaient de son infidélité, avaient eu la précaution de l’empoisonner. Tout le monde a les yeux sur Mirzanès, tout le monde craint de le trouver impliqué dans cette conspiration. Cosroès se retire avec sa suite pour éclairer une affaire si importante. Mirzanès reste seul avec Phalessar.

La découverte du complot inquiète le jeune chrétien, mais ne le décourage pas. Il compte sur les Abyssiniens que Memnon lui a promis d’armer, et qui doivent porter à Cosroès un coup aussi sûr qu’inattendu. Mirzanès, sans s’expliquer entièrement, ne cache pas trop tous ces projets à Phalessar. Ce vieillard, de plus en plus déchiré par ses remords, oppose d’abord au jeune furieux tout ce que la religion chrétienne a de lieux communs sur la douceur, sur la mansuétude, sur la patience dans les souffrances. À ces lieux communs, Mirzanès répond par les maximes d’un chrétien fanatique qui se croit tout permis quand il trouve son culte en danger, et qui lève, sans balancer, le glaive jusque sur son prince, si la volonté du prince ne se trouve pas d’accord avec la volonté de son Dieu. Le combat entre le chrétien doux et le chrétien violent est long et vif, et Phalessar n’a pas lieu de s’applaudir de son éducation chrétienne. Il n’a pas encore fait de progrès sur le cœur de son prosélyte frénétique, lorsque les conjurés qui doivent assassiner Cosroès paraissent avec Memnon à leur tête. Celui-ci ne s’arrête qu’un moment. Il remet le commandement de la troupe à Mirzanès, pour suivre son petit plan particulier ; il va dénoncer ce conjuré à Cosroès, afin qu’il puisse être pris en flagrant délit et que le roi, pressé par le danger, le fasse exécuter avant de savoir que c’est son fils.

Lorsque Phalessar voit Mirzanès à la tête des conjurés et sur le point de consommer ses funestes projets, il sent bien qu’il ne lui reste plus d’autre parti que de révéler à ce furieux le secret de sa naissance afin de le faire renoncer à ses desseins criminels. Il exige donc de lui de faire retirer cette troupe de meurtriers parce qu’il a des choses de la dernière importance à lui confier. Mirzanès résiste longtemps. Il n’est pas sans défiance et il craint quelque trahison de la part d’un chrétien aussi tiède que Phalessar. Enfin il consent d’éloigner les compagnons de ses desseins, mais à peine sont-ils retirés, à peine Phalessar ouvre-t-il la bouche pour apprendre à Mirzanés ce qui lui importe tant de