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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

crime, et finissent tous leur vie par le dernier supplice. Ce dénoûment est horrible, outré et de mauvais goût. Le but moral de cette brochure est excellent, mais l’exécution en est mesquine et misérable ; il arrive presque toujours à l’abbé Coyer de concevoir fortement, philosophiquement, et d’exécuter d’une manière futile et pitoyable. Ses brochures sont des phénomènes éphémères dont la durée se borne à une journée de Paris. Il règne d’ailleurs une grande uniformité dans ce petit roman, et cette uniformité en rend les deux tiers ennuyeux et insipides. Cela est à cent mille lieues de Zadig. Si M. de Voltaire avait envoyé promener Chin-ki dans les rues de la capitale, combien la satire de nos mœurs, de nos sages règlements, de notre belle police, serait devenue vive, piquante, ingénieuse et variée ! Bonsoir à M. l’abbé Coyer-Chin-ki.

— On a fait sur la comédie de la Gageure imprévue la polissonnerie suivante :

Quand avec une femme on fait une gageure,
Il faut avoir présent la clef de la serrure.

M. de La Louptière vient de recueillir en deux volumes in-12 ses Poésies et Œuvres diverses, qui ont fait pendant si longtemps un des principaux ornements du Mercure de France, et les délices de ses abonnés de province. On voit à la tête le portrait de l’auteur, qui a l’air aussi spirituel que ses ouvrages.

— On vient de publier les Confessions de mademoiselle de Mainville, duchesse de ***, à la comtesse de N***, son amie, trois volumes in-12[1]. Je ne sais quel est l’indiscret qui a osé divulguer ces Confessions ; mais je me suis bien gardé de partager son tort en les lisant ; et je crois que vous vous trouverez bien d’imiter ma réserve.

M. de Moissy vient de faire imprimer la comédie des Deux Frères, ou la Prévention vaincue. On voit, par la préface qu’il a mise à la tête, qu’il espère que la lecture de sa pièce fera casser le jugement que le public a porté à la représentation ; et comme l’arrêt des lecteurs n’est pas aussi démonstratif ni aussi décisif que celui des spectateurs, il ne tiendra qu’à M. de Moissy

  1. Par Galtier de Saint-Symphorien, Paris, Dufour, 1768.