Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/102

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voulons pas qu’un livre d’imagination, ou même de morale, nous applique autant que le pourrait faire un livre sur les sciences abstraites. Entraîner doucement le lecteur et l’étonner quelquefois, tel est l’effet de tout bon ouvrage : piquer, tourmenter, harceler sans cesse celui dont on desire captiver l’attention, est un mauvais moyen de le tenir éveillé ; la fatigue endort, et plus profondément que l’inaction : alors on ne cède point au sommeil, on y succombe. Mais il est absolument impossible de réussir dans l’extravagante prétention de remplir toutes les pages d’un livre de traits brillans, de comparaisons et de pensées nouvelles. Avec de l’esprit on trouvera bien quelques bonnes idées ; mais le plus souvent on sera faux, alambiqué, puéril ; on tombera dans le néologisme et dans la pédanterie ; on aura un style froid et précieux, et même avec beaucoup de talent on ne fera, après avoir pris des peines infinies, qu’un mauvais ouvrage, et mortellement ennuyeux pour tous ceux qui ont du goût, et qui, par conséquent, aiment le naturel.

La mère de madame de Staël n’eut qu’un défaut, mais ce défaut troubla sa vie, y jeta à la fois du ridicule et de l’amertume, lui fit faire