Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

écrit le récit qu’elle a entendu faite par une personne de la société ; elle se borne à le retracer avec rapidité, ne se donnant ni la peine ni le temps de le revoir. Je sais bien, dit-elle dans l’avertissement, que pour le public le temps ne fait rien à l’affaire ; aussi fera-t-il bien de dire du mal de mon ouvrage, s’il l’ennuie ; mais, s’il m’ennuyait encore plus de le corriger, j’ai bien fait de le laisser tel qu’il est.

Sortie de la plume de tel auteur, que je ne nommerai pas, cette phrase serait d’une extrême fatuité ; dans la bouche de madame Cottin, ce n’est que l’expression simple et naïve de la modestie. Elle sentait tout ce qu’il y avait d’étrange dans la position d’une femme auteur. Pressée, d’une part, par le tourment d’un esprit qui sent sa force, et qui, resserré dans les bornes trop étroites du sentiment intérieur de sa supériorité, éprouve le besoin de se manifester au dehors ; retenue d’un autre côté par cette aversion pour tout ce qui pouvait attirer l’attention sur elle, son génie, aux prises avec sa modestie, préparait un triomphe dont elle continuait à ne voir que les dangers, quand il n’avait plus que des jouissances à lui présenter.

Madame Cottin n’ignorait pas que depuis