Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/283

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ici. Frédéric était là quand j’avais commencé à parler, mais il n’avait pas dit un mot ; il attendait, pâle et les yeux baissés, la réponse de M. d’Albe ; celui-ci, nous regardant fixement tous deux, me répondit : « Pourquoi n’irais-je pas à la place de Frédéric ? J’entends mieux que lui le genre d’affaires de votre amie ; au lieu qu’il est en état de suivre les miennes ici : d’ailleurs il dirige les études d’Adolphe avec un zèle dont je suis très-satisfait, et j’ai été touché plus d’une fois en le voyant auprès de cet enfant user d’une patience qui prouve toute sa tendresse pour le père… » Ces mots ont atterré Frédéric. Il est affreux sans doute de recevoir un éloge de la bouche de l’ami qu’on trahit, et une estime que le cœur dément, avilit plus que l’aveu même d’avoir cessé de la mériter. Nous avons tous gardé le silence ; mon mari attendait une réponse ; ne la recevant pas, il a interrogé Frédéric. « Que décidez-vous, mon ami ? a-t-il dit : est-ce à vous de rester, est-ce à moi de partir ? » Frédéric s’est précipité à ses pieds,