Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/289

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mon cousin, s’il y a des inconvéniens à la vérité, il y en a plus encore à la dissimulation ; l’exemple de Claire en est la preuve : il nous apprend que celui qui se sert du mal, même pour arriver au bien, en est tôt ou tard la victime. Si dès le premier instant elle vous eût fait l’aveu de l’amour de Frédéric, cet infortuné aurait pu être arraché à sa destinée ; ma vertueuse amie serait pure de toute faiblesse, et vous-même n’auriez pas été déchiré par l’angoisse d’un doute ; et pourtant où fut-il jamais des motifs plus plausibles, plus délicats, plus forts que les siens pour se taire ? Le bonheur de votre vie entière lui semblait compromis par cet aveu : quel autre intérêt au monde était capable de lui faire sacrifier la vérité ? Qui saura jamais apprécier ce qu’il lui en a coûté pour vous tromper ? Ah ! pour user de dissimulation, il lui a fallu toute l’intrépidité de la vertu.

Moi-même, lorsqu’elle me confia ses raisons, je les approuvai ; je crus qu’elle aurait le temps et la force d’éloigner Frédéric