Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/313

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mon existence eût commencé avec la sienne, et que nos deux âmes, confondues ensemble, s’étaient identifiées par tous les points. On se console d’une erreur de l’esprit, et non d’un égarement du cœur : le mien m’a trop mal guidée pour que j’ose y compter encore, et je dois voir avec inquiétude jusqu’aux mouvemens qui le portent vers toi. Ô Frédéric ! mon estime pour toi fut de l’idolâtrie ; en me forçant à y renoncer, tu ébranles mon opinion sur la vertu même ; le monde ne me paraît plus qu’une vaste solitude, et les appuis que j’y trouvais, que des ombres vaines qui échappent sous ma main. Élise, tu peux me parler de Frédéric : Frédéric n’est point celui que j’aimais ; semblable au païen qui rend un culte à l’idole qu’il a créée, j’adorais en Frédéric l’ouvrage de mon imagination ; la vérité ou Élise ont déchiré le voile, Frédéric n’est plus rien pour moi ; mais comme je peux tout entendre avec indifférence, de même je peux tout ignorer sans peine, et peut-être devrais-je vouloir que tu continues à garder