Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/97

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des objets communs, et qui ne quitte pas les formes ordinaires de la conversation, ne passe pas pour avoir de l’esprit ; il a beau s’exprimer de manière à être bien entendu il n’a rien d’expressif : mais celui dont les idées sortent des routes communes, qui joint l’extraordinaire à la rapidité ; celui qui en un mot déplace les idées de ceux qui l’écoutent, et leur communique ses mouvemens, celui-là passe pour avoir de l’esprit. Que ses idées soient justes ou non, exprimées avec goût ou sans goût, n’importe ; il a remué ses auditeurs, il a de l’esprit.

Je ne parlerai pas ici de la différence de l’esprit à l’imagination active et au génie ; ce n’est pas mon objet : il faut en venir au talent. Qu’un homme exprime ses idées ou celles d’autrui avec force, avec grâce, avec séduction ; qu’il dise des choses communes, si l’on veut, mais qu’en les disant ou en les écrivant il les pare du charme de l’expression, il aura du talent en vers comme en prose. Il y a généralement plus d’esprit que de talent en ce monde. La société fourmille de gens d’esprits qui manquent de talent. L’esprit ne peut se passer d’idées, et les idées ne peuvent se passer de talent ; c’est lui qui leur donne l’éclat et la vie : or les idées ne deman-