Page:Couturat - Le principes des mathématiques, La Philosophie des mathématiques de Kant (1905) reprint 1980.djvu/272

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263] n’est pas autre chose que le concept d’une collection ; demander que l’on conçoive le nombre sans penser une collection, c’est demander l’impossible. D’autre part, c’est une loi psychologique que tout concept, même le plus abstrait et le plus « pur », a besoin de s’appuyer sur quelque image ; il est donc naturel et nécessaire que nos raisonnements sur les nombres s’accompagnent d’images plus ou moins vagues. Mais la question épistémologique, absolument indépendante de ces circonstances psychologiques, est celle-ci : Quel est le fondement logique des vérités arithmétiques ? Est-ce le concept, ou est-ce l’intuition ? Lorsque Kant considère comme analytiques des jugements comme ceux-ci : « L’or est jaune », ou « Tout corps est étendu », il ne prétend pas que, en formulant ces jugements, nous bannissions toute image sensible : car ce serait encore plus difficile que pour les vérités arithmétiques. Il n’exige pas que nous pensions l’or sans imaginer sa couleur, ni les corps sans imaginer leur étendue (puisque, selon sa propre doctrine, nous ne pouvons jamais nous débarrasser de l’intuition de l’espace) ; et pourtant il ne soutient pas que les susdits jugements soient entachés d’intuition, et par suite synthétiques. Pourquoi ? C’est que, quelle qu’en soit l’origine psychologique, et quelles que soient les images dont ils s’accompagnent inévitablement, les concepts d’or et de corps comprennent actuellement, par définition, les concepts de jaune et d’étendu. Eh bien, de même, le concept, non pas de « 7 et 5 », mais de « 7+5 », de quelque manière qu’on l’ait formé, contient actuellement et par définition le concept de 12, bien mieux, il lui est identique.