Page:Couturat - Le principes des mathématiques, La Philosophie des mathématiques de Kant (1905) reprint 1980.djvu/293

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en réalité : « Les deux points A et B déterminent une droite, en vertu de la définition même de la droite. » Quand on dit : « Prolongeons la droite AB », c’est là un accident empirique de la figure tracée matériellement, car la droite AB est essentiellement infinie. De même enfin, quand, 2 droites orthogonales étant données, on parle de mener par l’une d’elles un plan perpendiculaire à l’autre, on ne fait que réaliser ce qui était impliqué dans l’hypothèse : car 2 droites sont orthogonales, par définition, lorsque l’une d’elles est contenue dans un plan perpendiculaire à l’autre (on démontre que cette propriété est réciproque) ; par conséquent, le plan en question existait déjà, par définition. Il en est de même partout : on ne peut construire (utilement et valablement) aucune figure qui ne soit déjà déterminée par les données ou les définitions. On ne fait que réaliser empiriquement des éléments préformés de la figure idéale ; et comme c’est sur celle-ci qu’on raisonne, on ne lui ajoute rien à proprement parler ; on ne construit, on ne crée aucun élément, on le rend seulement sensible à mesure qu’on en a besoin. C’est comme si l’on repassait à l’encre un dessin esquissé en traits presque invisibles au crayon. Aussi, tout ce qu’on dit être vrai « par construction » peut être dit vrai « par hypothèse » ou « par définition ».

Ainsi, lors même que les constructions seraient indispensables, elles n’impliqueraient pas un appel à l’intuition. Mais elles ne sont pas si indispensables qu’on le croit, d’après les « éléments » de la Géométrie synthétique. On a depuis longtemps critiqué le caractère artificiel des démonstrations d’Euclide parce qu’elles s’appuient sur des constructions parfois [285]