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journal du siège de paris.

pouvoir temporel. L’avenir est sombre. Espérons que la Providence nous donnera bientôt des jours meilleurs !

Dimanche, 18 septembre. — Temps doux comme au mois de juillet. Il nous faudrait de la pluie et du froid afin d’épuiser les Prussiens. Aujourd’hui, à l’église, il y avait beaucoup plus d’hommes que d’ordinaire. Habituellement, sur cent personnes qui assistent aux offices le sexe fort mais laid en compte cinq ou six. Ce matin, à la messe de dix heures, il y avait presque autant d’hommes que de femmes. D’où viennent ces fidèles ? De la province qui se réfugie à Paris. Les Parisiens, en présence des balles et des obus prussiens, ont-ils retrouvé au fond de leurs cœurs la foi de leurs pères ? Après avoir jeté au bureau de poste ma lettre et des journaux, je fais une promenade sur les boulevards. Comme aux jours les plus calmes, les trottoirs sont encombrés de familles endimanchées, les cafés sont pleins, et les moblots blaguent et rient comme si les Prussiens étaient à Berlin et non pas sous les murs de Paris. Au coin de la rue Vivienne, à la librairie Lacroix, je vois affichée une liste d’ouvrages qui, publiés en Belgique, n’avaient pu entrer en France sous l’empire. Ces productions, dont les titres seuls font deviner les infamies qu’elles renferment, sont dirigées, les unes contre le pape, les autres contre l’empereur. Naturellement, la république s’empresse d’autoriser la vente de tous ces livres. — Il paraît que l’on s’est battu près de Vincennes. Tous les voisins sont aux portes et