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journal du siège de paris.

Tours, obligé de chercher un refuge dans une ville du Midi, ne pourrait plus envoyer des pigeons au gouverneur de Paris ? Ce silence obstiné inquiète la population parisienne, qui commence à voir l’avenir sous les couleurs les plus sombres. Beaucoup de rumeurs. On prétend avoir entendu, de l’autre côté de Versailles, la canonnade de l’armée de Bourbaki. M. Thiers serait à Paris depuis hier soir. Pourquoi ? Serait-ce pour apporter des propositions d’armistice ? Kératry et d’Aurelle de Paladines auraient fait leur jonction à Pontoise. Je parierais dix contre un qu’il n’y a pas un mot de vrai dans tous ces cancans.

Mercredi soir, 14 décembre. — Brouillard, temps doux. Tant mieux, car lorsque le bois se vend sept francs les 100 livres, il fait cher se chauffer. On parle de deux engagements dans la nuit d’hier. Le premier, à Boulogne, près de Saint-Cloud, aurait coûté 1,500 hommes aux Prussiens. Dans le second, les Allemands auraient tenté de reprendre le plateau d’Avron, occupé par l’armée de Paris depuis la bataille du 2 décembre. Repoussés par l’artillerie française, ils auraient perdu plus de 2,000 hommes. Le chiffre de la mortalité a augmenté de plus de quatre cents dans la dernière semaine. C’est surtout chez les femmes et les enfants que la mort fait le plus de victimes. Il ne saurait en être autrement, principalement pour les enfants, à cause de la rareté du lait, qui se vend à un prix inaccessible aux petites bourses. La misère va en augmentant. L’industrie et le commerce sont para-